Les chemins de Damas passent par Beyrouth

À la différence de l’Israël voisin, le Liban, certes francophone depuis le protectorat colonial, n’est pas un réservoir de voix intéressant pour les politiques français. Seuls 23 000 Français, expatriés et binationaux, sont enregistrés au consulat de Beyrouth, dont seulement 17 000 inscrits sur les listes électorales. C’est probablement pourquoi depuis Ségolène Royal lors de la campagne de 2007, aucun politicien ne s’était rendu dans cette métropole du Proche-Orient pour promouvoir son programme politique.

Pourtant les candidats à la présidentielle de 2017 se bousculent dans la capitale libanaise pour asseoir leur crédibilité internationale cette année. Comment expliquer cet intérêt soudain pour Beyrouth ? La métropole libanaise offre un avantage non négligeable : elle est une plate-forme sécurisée et géographiquement crédible pour dévoiler ses positions à l’égard de la Syrie voisine où la guerre dure depuis 2011. Tout particulièrement, pour les tenants d’un dialogue avec Bachar el-Assad, surtout depuis la dernière élection présidentielle libanaise qui a placé au pourvoir Michel Aoun, ancien héraut de la lutte contre le régime syrien qui a ensuite effectué un volte-face en se rapprochant de Damas.

Mais le Liban est aussi le lieu pour exprimer un soutien des chrétiens d’Orient dont le sort tragique sous le joug de Daesh a ému l’ensemble de l’Occident. Et en particulier la France, très attachée à cette communauté, depuis notamment la protection accordée par Napoléon. Un positionnement qui peut donc s’avérer profitable, notamment pour le Front National, qui de surcroit, bénéficie sur place de réseaux importants avec les nationalistes chrétiens locaux. Hérités de l’exil de l’actuel président Michel Aoun en France dans les années 1990 et des contacts hérités de la guerre civile (1975-1990) où plusieurs responsables frontistes avaient alors porté les armes pour combattre avec les forces chrétiennes libanaises.

Cependant, cette volonté se heurte à la réalité libanaise et syrienne, qui rappelons-le est d’une complexité extrême et un terrain miné. D’abord, le postulat que les chrétiens du Liban seraient tous pour le régime de Damas est fausse : nombre d’entre eux ont eu à souffrir lors de l’occupation syrienne qui n’a pas épargné les chrétiens. Et pour cause, le régime hérité de son père par Bachar el-Assad a toujours eu pour allié le Hezbollah libanais qui lui-même est le bras armé et idéologique du Hezbollah iranien.

N.M.